Salutation au soleil (ou pas…) : comment transiter du « chien-tête-en-bas » à la posture équestre ?

À la faveur de Makara Saṇkrānti, le « solstice védique » si vous voulez, nous avons pratiqué cette semaine, une séance pour honorer la remontée de notre astre dans le ciel (de notre point de vue terrestre en tous cas…), en empruntant notamment quelques postures qui appartiennent à la traditionnelle Salutation au Soleil (en sanskrit Sūrya Namaskāra). Maintenant, s’il est très agréable de se laisser glisser, passer, danser d’une pose à l’autre, il arrive aussi que cette fluidité soit rompue par la difficulté qu’a parfois le pied à « transiter » depuis le « chien avec la tête en bas » (adhomukhaśvānāsana, deux pieds derrière) vers la posture dîte équestre (aśvasaṇcālanāsana, un pied devant entre les mains)…

Un enchaînement – pied derrière, pied devant – qui pourtant non-seulement appartient à Sūrya Namaskāra, la Salutation au Soleil, mais qui est aussi une transition assez classique et récurrente en yoga et qui vaut donc que l’on s’y attarde… Sauf que selon la longueur des ischios-jambiers et/ou du psoas, la liberté de la hanche ou la force – voire la longueur – des bras, celle-ci n’est pas toujours évidente… maiiiiiiis il y a toujours moyen d’aider, et j’espère que les petites astuces présentées ci-dessous pour passer « du chien au cheval » vous permettront d’apprécier mieux votre pratique. C’est le moment de se re-dédier, vous savez… ☺️

« Je me prosterne devant le Soleil, le plus brillant des luminaires, qui tient un lotus blanc dans chacune de ses mains, et conduit à travers le ciel un char, emmené par sept chevaux. »

_ Sūrya Strotra

Entre chien et cheval : 5 pistes pour quand le pied « coince »…

Donc nous sommes en posture du chien, disons de V inversé, et nous voulons amener par exemple la jambe droite en avant, pour arriver pied droit entre les mains, tibia vertical. Quand zut, le pied frotte et s’arrête au beau milieu du tapis 😩… Que faire ?

1- faire le mouvement en deux temps (et/ou « à la main » !)
D’abord, si ce « raté » nuit à la fluidité du mouvement (oui je sais cela vous agace…), ce n’est pas dramatique… et vous avez toujours la possibilité de… « petite chenille du pied »… marcher les orteils vers le haut du tapis, ce qui fait au passage fonctionner toute une pléïade de micro-muscles intrinsèques du pied… (pas inintéressant pour des pieds le plus souvent chaussés !). 
Ou bien, plus rapide – si vous voulez garder le rythme respiratoire, vous attrapez franchement votre cheville droite et vous amenez « manuellement » le pied entre les mains. Et voilà, le tour est joué…

2- monter les aines
C’est souvent là que le bât blesse… le bassin est trop bas. Et c’est pourquoi c’est toujours la consigne que je donne dans adhomukhaśvānāsana, le « chien », même si l’on ne transite pas ensuite. Monter les aines, monter les hanches vers le plafond, loin des aisselles… et ce, afin de créer un espace en dessous du corps pour que le pied puisse passer en avant. N’ayez pas peur dans cette transition d’arrondir le haut du dos, c’est naturel que cela se fasse et pratiquement impossible d’amener le pied loin devant si le dos reste « droit ». Pssst… C’est une transition… C’est permis…

3- mettre des briques sous les mains
Selon la même logique qu’il faut un grand espace en-dessous du corps pour que la jambe ait toute latitude de venir en avant, si l’on remonte le sol sous les mains, vos bras seront plus longs et il y aura plus de place pour la jambe. C’est peut-être moins confortable pour la prosternation et le cobra, mais je rappelle que toute la salutation peut se faire d’un bout à l’autre mains sur les briques. Question de proportions, on en a souvent parlé en ateliers…

4- partir du bassin (c’est « dans la tête » !)
Ne vous focalisez pas sur le mouvement du pied, loin là-bas à l’extrémité du corps… Mais – vous savez que je favorise toujours le travail proximal, au plus près du centre – sur le mouvement de votre bassin. C’est votre bassin qui avance dans l’espace, le pied, la jambe ne font que suivre le mouvement du centre du corps. Juste garder cette idée à l’esprit suffira peut-être à changer votre manière d’exécuter le mouvement…

5- passer par un quatre-pattes
Si les solutions précédentes ne fonctionnent pas pour vous, il reste l’option de passer par un quatre-patte. C’est-à-dire de remplacer le chien du retour par une position sur les mains et les genoux et d’amener le pied en avant à partir de là. Généralement cela est plus aisé, parce que la question de l’équilibre ne se pose pas autant. Le centre de gravité est plus bas. On est plus stable. Et on peut remonter le buste pour faire place à la jambe. Bref, c’est plus facile et ça peut tout à fait être une bonne variante à adopter, pour toujours ouuuuu provisoirement…

Petite précision… Vous m’avez fait remarquer qu’il m’arrive de « prendre de l’élan » en amenant la jambe d’abord vers l’arrière puis entre les mains… En réalité, ce n’est jamais une très bonne idée en yoga de prendre de l’élan (si on n’y arrive pas sans du moins… car on compte alors sur une force extérieure et non sur notre propre force musculaire et l’on prend le risque d’aller trop loin pour soi, par rapport à nos possibilités du moment…). Je pense en l’occurrence qu’il s’agit là plutôt d’un développement du mouvement initial, qui devient plus ample, plus délié, plus « dansé » si vous voulez, à mesure que l’on avance dans sa série de Salutations-Révérences… et non d’une aide pour y arriver, mais bien-sûr, vous pouvez explorer cette piste-ci (pied se lève en arrière, puiiiiis vient devant) également… 😉

Gardez enfin et surtout en mémoire que c’est surtout une question d’habitude et d’entraînement… Ne perdez pas courage… Pratiquez… et tout se mettra en place…

Voilà… Je vous souhaite que le naturel revienne au galop ! Gwenaëlle