Flower Power : l’Achillée millefeuille, un trésor pour les trois doshas…

Étymologiquement, l’Achillée c’est l’herbe d’Achille, qui l’employa lors de la guerre de Troie pour soigner ses soldats (d’où son surnom « d’herbe au chevalier » ou « herbe militaire »). Mais « la millefeuille » comme on l’appelle aussi parfois, était également connue en Asie de longtemps… : en actuel Irak par exemple, où l’on a retrouvé des pollens d’Achillée dans la tombe d’un homme de… Néandertal ! En Chine, où l’on utilise ses tiges comme bâtons divinatoires pour la pratique du Yi King, ou bien en Inde du Nord, où l’Āyurveda la considère avant tout comme une plante Pitta, et c’est pourquoi je vous la présente aujourd’hui alors que l’été, la saison Pitta par excellence, promet d’être caniculaire…

le petit parterre que vous apercevez en arrivant pour vos cours…

Vous la trouverez en ce moment au bord des chemins ou dans les champs (c’est l’une des 7 herbes sacrées de la Saint-Jean) et reconnaîtrez l’astéracée (non, ce n’est pas une ombellifère quoiqu’elle en aie l’air…) à ses multiples petites fleurs blanches ou rosées (on en cultive aujourd’hui de toutes les couleurs mais je parle de l’Achillée naturelle, sauvage) ainsi qu’à sa feuille très découpée, presque une petite plume !, qui ressemble à celle de la carotte sauvage (ou paraît-il, à un « sourcil de Vénus »). Le coeur de chaque petit capitule est jaune, vous ne pouvez pas vous tromper (avec la fleur de ciguë par exemple, également blanche mais très toxique et qui lui ressemble…). Fraîches, les jeunes feuilles et fleurs se consomment en salades, en soupes ou sautées à la manière des épinards. Plus poivrées, les feuilles moins tendres peuvent, comme au XVIIème siècle, servir de condiment.

Pour ma part je l’aime bien sèche, en tisane. Car son goût légèrement corsé et assez amer me rappelle celui du thé vert, dont elle a d’ailleurs les tanins (antioxydants) et le côté tonifiant. La tisane d’Achillée est de plus réputée protéger le foie et la muqueuse de l’estomac (elle aide tout ce qui est digestif). Elle épure les reins, augmente les sécrétions biliaires, aide (un peu…) en cas de prolapsus, d’inflammation des ovaires ou de fibromes utérins. Disons toutes formes de stagnations dans la région du petit bassin. Et en fin de règles, elle permet d’aider à l’élimination complète de l’endomètre (quand il persiste encore de petits « saignottements » pendant quelques jours). C’est d’ailleurs comme « Maîtresse du sang » qu’on la connaît le mieux, l’Achillée ayant la réputation de le purifier et de l’arrêter (on l’appelle aussi « herbe aux coupures », « saigne-nez » ou « herbe au charpentier »), et vous avez sans doute déjà, enfant, frotté de ses feuilles sur une petite plaie saignante. Non ? Avis aux randonneurs, essayez, ça marche ! C’est pour ma part la première plante médicinale que j’ai apprise à reconnaître, et c’est un émouvant souvenir…

« Presque tout le monde, depuis l’enfance, a été touché par la beauté inapprivoisée des fleurs sauvages ».

_ Lady Bird Johnson

Du point de vue de l’Āyurveda, l’Achillée millefeuille, Achillea millefolium en latin, Gandana ou encore Birangasipha en sanskrit, est une plante essentiellement Pitta, rafraîchissante, et qui va réguler tous les déséquilibres d’ordre « feu » en nous : les indigestions (qui sont plutôt un manque d’Agni, de feu digestif), les fièvres, les inflammations, les ulcères, les brûlures (de la peau, mais aussi d’estomac). En hydrolat, elle traitera les acnés, notamment les acnés hormonales. Et nombre de problèmes de peau (eczéma, rides, feu du rasoir etc…). On peut également la faire macérer dans une huile végétale pour résoudre tous ces petits problèmes inflammatoires finalement de l’épiderme : 150g environ de feuilles et fleurs fraîchement cueillies dans 2 tasses d’huile d’olive par exemple à laisser au soleil sur un rebord de fenêtre pendant trois à six semaines (l’Achillée va noircir, c’est normal…), puis on filtre, et on ferme.

C’est donc une herbe principalement Pitta, mais que l’on peut aussi cependant conseiller aux deux autres doṣas (tempérament āyurvédiques) : Vāta et Kapha, qui sont quant à eux des tempéraments « froids » :

  • À Vāta, car l’Achillée aura tendance à empêcher la formation de gaz (dans l’estomac comme dans l’intestin, ce qui est un problème typiquement « Vāta »…), et qu’elle va calmer les nerfs (bonne en cas de névralgies) et le coeur.
  • Et à Kapha, car l’Achillée va contrôler les sécrétions et diluer les mucus. Elle sera efficace en hiver contre les rhumes et la grippe (sudorifique, elle induit la transpiration, faisant baisser la fièvre et aide à lutter contre les infections). Oui, je sais, on n’a guère envie d’y penser aujourd’hui, mais on ne regrettera pas d’en avoir cueilli ces jours-ci (au petit matin, il fait trop chaud l’après-midi) lorsque l’hiver et sa bise seront venus… Je pense que je vais faire une composition hivernale, avec de l’ortie, du bouillon blanc et du plantain que j’ai déjà ramassés…

Et quel que soit le dosha, on peut aussi brûler les feuilles sèches (comme de la sauge) en guise d’encens afin de purifier physiquement et énergétiquement une pièce. L’odeur de l’Achillée (on la trouve aussi à diffuser en HE) est apaisante et calmante. Parfait avant une séance de yoga…

Voilà… je vous souhaite de beaux bouquets d’amour, de guérison et de courage, Gwenaëlle

Note : attention quand même, l’Achillée millefeuille est interdite aux femmes enceintes car elle peut provoquer des contractions utérines… et aux – rares, mais il faut le dire… – personnes allergiques aux astéracées (comme le pissenlit, le tournesol, la marguerite ou la camomille). Très jolie au jardin où elle attire les papillons et les pollinisateurs, elle peut parfois être nocive pour les animaux de compagnie… (mais je n’ai jamais constaté ça…)